Les Tambours burundais, éléments importants de la culture burundaise
1. Introduction
En élevant des vaches et en plantant des arbres, nos ancêtres ne savaient pas que de ces vaches et de ces arbres allait naître ce qui fait aujourd’hui la fierté du Burundi : le tambour sacré, fabriqué à partir d’une peau de taureau tannée et d’un tronc d’arbre creux. Les tambours Burundais font partie du patrimoine national. Ce sont des instruments à caractère traditionnel qui occupent une place mythique dans la culture burundaise. Issus d'une tradition royale, ce sont des objets sacrés, réservés aux événements exceptionnels. Les spectacles de tambourinaires burundais mêlent des danses, des chants et des cris. Qu’ils soient amateurs ou professionnels, les chants des groupes de tambourinaires louent et rappellent l’histoire du Burundi ainsi que la bravoure des souverains du royaume du Burundi. Les tambourinaires du Burundi ont la particularité de jouer parfois des tambours qu’ils portent sur la tête en dépit du poids de cet instrument. Jouer les tambours a donc une profonde signification pour les Burundais, car ils leur procurent de la joie, en tant que garants d'une ancienne tradition.
2. Histoire des Tambours Burundais
Selon l’histoire, Le nom « ingoma » (tambour) signifie le royaume. L’histoire du tambour burundais était intimement liée à la vie du roi et à la fécondité de la Nation en raison de l’ fête des semailles. À l'époque, le tambour annonçait les grands événements comme l’intronisation du roi, les funérailles des souverains. Selon une légende, le premier tambour serait arrivé au Burundi au 15e siècle, au règne du roi Ntare Rushatsi Cambarantama, premier roi du Burundi. Le premier rythme de tambour burundais aurait été joué par un serpent sur une peau séchée de taureau que ce souverain du royaume du Burundi aurait reçu de l'époux de sa tante. Ce roi serait venu de l’Est du Burundi. Arrivés dans la forêt appelée « Kibira », lui et ses compagnons reposèrent dans cette grande forêt et abattirent un taureau. Ses hommes tannèrent la peau du taureau abattu sur une termitière. Un serpent appelé « Inkoma » serait sorti de la termitière et aurait frappé de manière répétitive la peau fraîchement tannée. Apres, les compagnons du roi auraient tanné cette peau du taureau sur le tronc d’arbre creux et auraient commencé à le frapper. Les gens des environs accoururent pour voir ce qui se passait. Les compagnons du roi les informèrent que c’était le roi qui arrivait pour régner. Ainsi est né le tambour sacré au Burundi, devenu aujourd’hui le patrimoine de l’Humanité. Aujourd’hui, les tambourinaires appelés « Abatimbo » viennent de tous les coins du pays, essentiellement en province de Gitega, portant haut le message du peuple burundais vivant dans la paix et la sécurité, profondément attaché à son histoire millénaire, à sa culture homogène et à son héritage civilisationne.
3. Le sens historique des tambours burundais
Au Burundi, le sens de « tambour » est très large et peut signifier: dynastie, pouvoir, dignitaire, gouvernement, etc. Dans les temps anciens, les gens ne pouvaient pas fabriquer de tambours sans l'ordre officiel du roi. Seuls les rois avaient le privilège de posséder des tambours et de les faire battre pour eux-mêmes. Du temps de la monarchie (XVI ème au XVII ème), le tambour était sacré et était considéré comme un mythe du pays, symbole de la souveraineté du roi. Le roi était le père de toute la Nation et régnait en maître absolu. Il était propriétaire éminent de toutes les terres du Pays. Le tambour sacré du Burundi assurait donc la protection du pays. Chaque année vers le mois de décembre, le roi consommait une pâte de sorgho particulière, provenant de la récolte du mois de juillet précédant. Le soir il se faisait aussi battre le tambour sacré, nommé « Karyenda ». Le matin suivant, les tambourinaires du roi battaient tous les tambours rassemblés à la cour royale, tandis que le roi procédait à une grande distribution de vaches et de houes, représentant les principaux métiers du pays. Les tambours étaient battues toute une journée, et cela c’était pour donner le signal de semer le sorgho dans tout le pays. Les significations de cette fête sont multiples. A côté du tambour, véritable incarnation du pays, le roi voyait sa puissance renouvelée chaque année par ce rituel. Il était acclamé par des cris stridents de joie, par des chants et des danses.
4. Forme des tambours Burundais
Le tambour burundais est un instrument de musique composé de troncs d'arbres creux. Cette pièce de bois creuse est tendue avec de la peau de vache et fixée au bois avec des chevilles. Les Burundais utilisent généralement des baguettes en bois pour battre les tambours. Les parties du tambour sont comparables à celles d’une femme, telles que la poitrine (petites baguettes en bois supportant la peau de vache tendue, couvrant la partie creuse du tambour.), l'abdomen (partie creuse du tambour), le nombril (partie inférieure du tambour sur laquelle est posé le tambour.), le front (partie qui est autour la paroi supérieure du tronc creux du tambour), la ceinture (partie de couleur noire sous forme de ceinture qui est dessinée en bas de la partie creuse du tambour), etc. Par exemple, le creux du tambour est considéré comme le ventre d’une femme qui peut porter un bébé. La peau qu’on utilise pour faire le tambour doit être celle d’une génisse et non pas d’un taurillon.
5. Rôle des tambours dans la culture burundaise
Les tambours burundais constituent le grand symbole de la culture burundaise. C’est un vestige d’un Burundi royal et uni. Le tambour occupe une place de choix dans la culture burundaise. Cet instrument symbolise pour le Burundi la légitimité royale et la pérennité de la nation. Il est considéré comme un objet sacré. Il est joué dans des circonstances exceptionnelles: intronisation ou funérailles des souverains. Fabriquer et battre le tambour est une tradition qui date de longtemps. Jouer au tambour signifie beaucoup pour les Burundais, car, il leur procure de la joie, la fierté et revêt toute une histoire. Et le fait de battre le tambour est surtout de l'héritage. Aujourd’hui, dans les centres urbains, dans les écoles, dans des clubs culturels, etc., on apprend à battre le tambour. C’est un instrument qui fascine la jeunesse. Il est très apprécié par les la population locale et les étrangers. Le métier de tambourinaire, comme à l’époque traditionnelle, peut se transmettre aussi de père en fils. Les spectacles de tambourinaires burundais mêlent danses, chants et cris. Qu’ils soient amateurs ou professionnels, les chants des groupes de tambourinaires louent et rappellent l’histoire du Burundi ainsi que la bravoure des souverains du royaume du Burundi.
6. Les restrictions liées aux tambours burundais
Le métier de tambourinaire, comme à l'époque traditionnelle, peut se transmettre aussi de père en fils. Les femmes ne sont pas autorisées à jouer du tambour. La raison de cette interdiction est liée à la tradition. Le tambour était traditionnellement un objet sacré. Il était considéré dans une certaine mesure comme une représentation du corps d’une femme. Pour ce, on considère donc que la femme ne peut pas jouer de son propre corps. Une femme ne peut même pas approcher là où les tambourinaires sont en train de fabriquer des tambours. Une fois qu’une femme y apparait, les tambours se déchirent souvent. Actuellement, suivant l’article 3 du décret présidentiel nᵒ100/196 du 20 octobre 2017 portant réglementation de l’exploitation du tambour aux niveaux national et international, il est toujours strictement interdit aux femmes de battre le tambour. Par contre, elles peuvent accompagner les tambourinaires avec des danses folkloriques féminines. Selon le décret règlementant l’exploitation des tambours du Burundi, toute exhibition d’une troupe de tambourinaires en dehors de cérémonies officielles requiert l’autorisation du ministre de la Culture du Burundi ou de l’ambassade de ce pays.
7. Conclusion
Plus qu’un objet culturel et sacré, le tambour a été un vecteur de la générosité humaine, une philosophie éthique de l’unité présente dans plusieurs cultures bantoues de l’Afrique centrale, l’Afrique orientale et l’Afrique australe. Aujourd’hui, les performances de la danse aux tambours burundais suscitent et font résonner la personnalité et la générosité auprès de spectateurs burundais. Les sensations procurées par les puissants rythmes des tambours portent le sentiment du patriotisme, de la royauté et de la dignité du peuple burundais. En 2014, afin de les protéger, tambour burundais ont été inscrits au Patrimoine immatériel de l’Unesco. Le gouvernement de du Burundi a aussi réglementé depuis 2017 l’exploitation des tambours burundais au niveau national et international.
Auteur: MFITIYE Ferdinand, professeur du chinois à l'Institut Confucius de l'Université du Burundi.
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